Le coup de force, et même de génie, de Christian Oster
est d'avoir inventé une nouvelle sorte de héros romanesque.
Ce n'est pas si fréquent. La répétition, en ce
domaine, menace. Toutes ces créatures de fiction et de
papier en viennent à se ressembler. Ni tragique ni absurde,
le personnage d'Oster, lui, ne ressemble à personne. Ou à
tout le monde. Son héroïsme, il le trouve dans l'affrontement,
à mains nues pour ainsi dire, avec le langage. [...]
Il y a des rires de détente ou d'excitation. Celui que sus-cite
la prose de Christian Oster et la progression de son histoire
est d'une autre nature. Il tient, justement, à la méthode
de l'écrivain, à sa manière de mettre en scène l'opposition
majeure, tragique même, entre la plus parfaite contingence,
les incertitudes de l'existence, des aspirations, des désirs,
et les rigueurs ou les ambivalences langagières. On rit, jusqu'au
vertige, du spectacle. On y participe. On n'en revient
pas.
Patrick Kéchichian, Le Monde