«J'aimerais vous parler de la suite des événements comme un
grand-père attendri par ses hautes aventures. Mais non, je vais
avoir quatorze ans, je suis devant la plus grande décision de ma
vie, je dois faire péter le monde et j'en suis incapable, ooooo
puuuutttiiiiiinnnnn ! [...] Oui, je sentais bien que j'étais à deux
doigts de me dégonfler, les gars ! Et si je me dégonflais, ma vie
serait foutue. Je serais un démocrate fade et cultivé, assis dans
un fauteuil, lisant le journal, commentant l'actualité et achetant
des livres, ayant connu l'aventure d'un divorce ou d'une période
de chômage ou, à la rigueur, ayant vécu les deux, comme deux
petites guerres mondiales portatives et minables, oui, un type
éteint et satisfait, ou un militant bravement réjoui, affublé
d'enfants dont je n'aurais pas la garde, qui me visiteraient un
week-end sur deux, ou qui m'oublieraient, ou que je ferais
semblant d'aimer, enfin bref : la merde ignoble !»
Après Arkansas (Robert Laffont, 2008), Pierre Mérot se glisse
dans la peau d'un «ado» et renoue avec la verve satirique et la
critique sociale de Mammifères (prix de Flore 2003).