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10 novembre 1975, dans le village de Sainte-Hélène-de-Mancebourg en Abitibi, une journée pas tout à fait comme les autres allait s'inscrire dans les événements marquants de ma vie. Ce matin-là, c'était la troisième fois en moins de cinq ans que je devais déménager mon petit monde. Selon mon habitude, j'avais encore occupé ma nuit du mieux que j'avais pu pour me rendre jusqu'au matin. La nuit, j'étais en proie à la peur.
Ballotté d'une famille d'accueil à une autre, j'essayais tout le temps de m'enraciner quelque part, sans manifester mon mécontentement, de crainte que l'on ne m'aime plus. Du haut de mes sept ans, j'étais devenu un chevalier errant qui se battait pour survivre aux chamboulements.
D'une main, je portais péniblement ma petite valise bleue en carton mou, prématurément vieillie, de l'autre, je m'agrippais fermement à ma peluche Baby blue. J'avais l'essentiel de ma vie entre les mains. À cette époque, je voyais l'enfance comme une prison dont j'allais enfin pouvoir m'échapper en devenant adulte. J'ai d'ailleurs appris à compter en biffant sur le calendrier les jours qu'il me restait à faire avant ma libération. Atteindre dix-huit ans était beaucoup plus qu'un but, c'était devenu une obsession.