L'histoire d'Haïti, si elle n'était pas si poignante, serait un
véritable roman d'aventures ! Située au large de Cuba,
l'île porte le nom Ayiti inspiré de son premier peuplement,
les Amérindiens Taïnos, avant l'arrivée des Conquistadors.
Son entrée dans l'Histoire est fracassante : les hommes
de Colomb éblouis par l'or dont elle regorge à l'état naturel
pillent la région sans vergogne. Est-ce de cette époque
que date ce goût immodéré pour la richesse qui ne cessera
plus de miner ses dirigeants ? Après les flibustiers et les
corsaires, les colons français s'y installent : la voluptueuse
Saint-Domingue sera trois siècles durant la plus riche colonie
du royaume de France. Ses élites se métissent et le siècle
des Lumières nourrit les rêves de liberté des esclaves haïtiens.
Emmenés par Toussaint-Louverture puis Jean-Jacques
Dessalines, ils se soulèvent à la faveur de la Révolution française,
jettent à la mer les armées de Bonaparte et obtiennent en
1804 l'indépendance de l'île. La première république noire du
monde est née. Sulfureuse Haïti... L'île va payer au prix fort sa
liberté, et son apprentissage de la démocratie passe par la pire
instabilité politique. Alors que les puissances étrangères tirent
les ficelles à l'instar des Etats-Unis, de sanglantes dictatures
terrassent régulièrement le pays : les Duvalier, Papa et Baby
Doc puis les juntes militaires, soutenus par les cruelles milices
des tontons macoutes. Même le père Jean-Bertrand Aristide
devenu président se transforme en tyran, comme contaminé par
cette violence endémique.
L'île, exsangue après le terrible séisme, puis l'épidémie de choléra,
trouvera-t-elle encore la force de se relever ? En exil, elle
résiste à l'instar de ces Haïtiens qui n'oublient pas leur mère
patrie et portent haut ses couleurs : René Depestre (prix Renaudot,
1988), Frankétienne (pressenti pour le prix Nobel), Dany
Laferrière (prix Médicis 2009) ou encore Jean-Michel Basquiat,
peintre mondialement connu.