Spécialiste de littérature française dans une université anglophone
de Montréal, le professeur Ben Allan vit dans la nostalgie
de l'époque mythique où poésie rimait avec folie. Epoux
incompris de Laura, père dépassé d'un adolescent que son
addiction à la télévision a totalement déconnecté de la réalité,
il est peut-être, avant tout, le fils de Morris, juif octogénaire à
la gouaille et à l'ironie mordante qui passe dans une maison
de retraite une fin de vie rebelle.
Lorsque, contre toute attente, Ben obtient un prix pour l'essai
qu'il a consacré à la dromomanie, une pathologie de la
fuite touchant exclusivement les hommes, il devient l'objet de
toutes les attentions de l'université en la personne, notamment,
de Carla McWatts, dont les fonctions de chargée de communication
dissimulent un virulent tempérament d'artiste et
qui, à sa manière pour le moins étrange, réveille sa libido en
sommeil. Encouragé à céder au démon de midi par un collègue
à la sexualité extraconjugale débridée, Ben, qui ne rêve
en réalité que d'avoir une liaison avec... sa propre femme,
s'engage alors avec précaution sur le chemin de la tentation,
au bout duquel se tient l'inquiétant Dr Albanna, mi-psychiatre,
mi-psychopathe...
A travers Ben Allan, personnage passé maître dans l'art de
s'absenter de lui-même et qui traverse une crise de la cinquantaine
aux allures de parenthèse hallucinée, à la recherche
de réponses dont il n'a pas les questions, David Homel
dresse, entre épopée burlesque et roman initiatique, le
portrait d'une société en crise que son allégeance opiniâtre à
une réalité virtuelle comme sa démission au nom d'illusions
collectives rend toujours plus comptable de ses défaillances et
de ses amnésies.