«De tout ce que je possédais, je chargeai mon navire, et ainsi de
ma famille et de ma belle-famille, des espèces animales. (...) quand
la pluie annoncée par le dieu se mit à choir et que le temps parut
des plus effrayants, je montai dans mon vaisseau et en fermai la
porte. (...) Un jour entier, la tempête se déchaîna et un raz-de-marée
balaya les humains.»
Non, ceci n'est pas un extrait du récit biblique du Déluge : il s'agit de
L'Épopée de Gilgamesh, un récit mésopotamien bien antérieur, auquel Juifs et
Chrétiens ont emprunté nombre d'épisodes ou de thèmes. Et l'on sursautera
encore en découvrant un Jardin merveilleux, une plante de jouvence ou
certain Serpent...
La narration fait la part belle au voyage et à l'aventure, mais, au-delà, il y a
la quête du bonheur et de l'immortalité, des interrogations sur le sens de la
vie, l'émergence d'une conscience, de soi et de l'autre.
Quant aux personnages, quel devenir ! Car Gilgamesh, assurément, «deux
tiers divin et un tiers humain», est l'ancêtre et le modèle de tous les superhéros,
d'Hercule à... Superman ou Dragon Ball. Et Enkidou, son frère de coeur
et de combats, n'est-il pas, avant Tarzan et autres Mowgli, le prototype de
l'enfant élevé par des animaux et qui devient leur roi ?
Pour adapter la première épopée de l'Histoire, Philippe Remy a conjugué
sérieux et créativité, se fondant sur les fragments des diverses traditions et
les commentaires des spécialistes, mais osant privilégier la cohérence interne
et la littérature. Au final, soutenu par les belles illustrations de Nikolas List, il
nous livre un récit captivant et lyrique, accessible à tous, un roman d'initiation
à l'humanité, qui nous parle encore par-delà les millénaires, nous rendant si
attachants ces Mésopotamiens méconnus.