Port-au-Prince, Entre deuil et mémoire est le cri étouffé d'un
demi-million d'êtres enfouis sous les décombres ou jetés dans des
fosses communes et la longue plainte d'une humanité bouleversée
par la tragédie du tremblement de terre du 12 janvier 2010. Dans la
blessure du pays brisé où la souffrance ronge les corps et les coeurs,
où l'angoisse dévore la vie jusqu'aux bourgeons d'espoir, la poésie
demeure le seul vestige de ce qui fut et de millions de rêves sans
lendemain. Entre deuil et mémoire, Port-au-Prince n'est plus une
ville, mais le visage pierreux des enfants qui hurlent dans la nuit,
la longue clameur des désespérés qui réveille les astres, l'exil du
rire sur les lèvres, l'éclipse de l'avenir, la bouleversante errance des
rescapés.
Aujourd'hui, dans les matins de lassitude et de détresse, le
poète est un clochard dont les pieds battent la cadence des chants
englués dans la mémoire d'une terre saccagée pour que le monde se
souvienne que cette terre est une éternité de promesses. Quand sa
terre tremble, c'est l'âme du poète qui s'effondre.