Comment comprendre sociologiquement la constitution des univers sociaux d'artistes sans éluder ni l'irréductible singularité revendiquée par les artistes ni la difficulté à établir une définition univoque de cette population ?
C'est cette question que tente de traiter l'auteur en fondant son analyse sociologique des artistes dans une approche anthropologique du social.
Elle montre que les ressorts constitutifs des univers sociaux d'artistes sont moins à chercher dans des formes sociales ou historiques que dans des processus sociaux implicites, dans l'exercice d'une dialectique sociale faite de divergence et de convergence. De ce point de vue, la singularité et la "dérobade" dont fait preuve socialement la population artistique sont placées au cœur même de cette analyse sociologique.
En s'appuyant sur une enquête menée à Rennes, l'auteur examine trois registres de la vie quotidienne des artistes : comment négocient-ils, dans leur quotidien, leur position sociale d'artiste ? Quels sont les pivots et les ressorts des frontières sociales qui dessinent les limites mouvantes des univers sociaux d'artistes ? Comment traitent-ils leur rapport au public ? L'auteur pointe le paradoxe sur lequel s'affirme la contribution sociale des artistes à la cité : ils sont susceptibles de revendiquer jusqu'au mal-être leur singularité. Elle montre que la constitution des univers sociaux d'artistes ne reproduit pas les découpages des domaines artistiques classiques mais s'élabore autour et à partir des propositions artistiques. Elle suggère enfin que l'artiste est aussi spectateur de ses propositions artistiques lesquelles visent à "s'adresser à tout le monde mais en parlant à chacun à sa manière" en guise de contribution sociale.