La sous-traitance est omniprésente en matière de transport, dans chacun des modes. Elle y reste
cependant une réalité mal connue, voire insaisissable.
Il est vrai que l'approche doctrinale traditionnelle ne porte guère à l'étudier. Dans cette
approche, en effet, tout transporteur qui sous-traite est ipso facto commissionnaire de transport ;
or le commissionnaire ne sous-traite pas lorsqu'il s'adresse à un transporteur, il exécute sa mission.
Le présent ouvrage - le premier sur le sujet - part du postulat inverse : la commission de transport
n'est rien d'autre qu'un statut spécial du "sous-traiteur", et le transporteur peut sous-traiter
en tant que tel au regard du droit privé. La grille de lecture ainsi proposée permet d'éclaircir la question
des rapports entre transport et commission de transport, qui est l'une des plus anciennes et
difficiles du droit des transports. Elle permet également de rapprocher les solutions du droit français
de celles retenues dans les conventions internationales en matière de transport, qui pourtant
ignorent le contrat de commission.
Ces enseignements n'intéressent pas seulement les spécialistes de la matière. Dans tous les cas,
en effet, la solution consiste à refouler l'application entre extrêmes du droit commun de la responsabilité
civile délictuelle. La sous-traitance des opérations de transport est juridiquement neutre en
ce sens que le régime de responsabilité de l'opérateur est toujours le même, qu'il traite en direct
avec le client - comme commissionnaire ou comme transporteur - ou qu'il intervienne comme
sous-traitant. Il y a là un exemple de solution alternative à celle retenue en droit commun.
Ce particularisme ne doit pas faire illusion. Si le droit des transports règle depuis longtemps le
problème de la responsabilité, il a attendu 1998 pour s'attaquer - en transport routier de marchandises,
où les problèmes sont les plus aigus - à celui du paiement du sous-traitant, et 2001 pour y
doter la sous-traitance d'un contrat type. Il reste agité aujourd'hui par des requalifications judiciaires
périodiques de faux contrats de sous-traitance en contrats de travail ou de location avec délit de
marchandage.
La sous-traitance n'est donc pas encore maîtrisée dans le domaine des transports. Au moins sa
théorie générale est-elle désormais faite.