«C'est sûr, elle l'a eu trop tôt. Zébulon a toujours affiché
cette vélocité de puce. Un ressort, une piafferie chronique,
l'éclaireur intrépide qui met la troupe en danger. Sa tête à elle
n'était pas formatée. Il a poussé gigolo, elle n'avait que des
barrettes dans le coeur. Il a tapé au soupirail un jour de rouge
à lèvres et de cheveux shampouinés de frais, qui se déploient
en éventail, sur la cambrure du dos. De longs cheveux que l'on
finit par lisser entre l'index et le pouce.
Elle n'avait surtout pas voulu le voir venir, en tapinois. Faites
comme si je n'étais pas là ! À quinze ans, une belle figure de
petite blonde, tout sucre et tout boudoir, première clope maladroite
à l'angle d'un bar, les talons calés crânement au mur,
impossible d'entendre brailler les couches au coin de l'amour
et des baisers !»
Zébulon est-il un demeuré ou un avatar ? Mélanine, sa trop jeune mère,
tient de la fée et de la sorcière. Ensemble ils traversent le désert pour
échapper à une humanité aux lois oppressantes. Cet amour maternel
et filial mis à l'épreuve, Nathalie Potain nous invite à le partager
avec une écriture toute entière au service d'une énergie jubilatoire de
la transgression.