Si La Farce n’était qu’un « reportage » sur l’art de vendre du vent aux badauds crédules que nous sommes tous, ce serait déjà un document étonnant. Jamais encore on n’avait révélé avec cette intelligence et ce cynisme bon enfant les ficelles du métier de « camelot », que Charles Bessière connaît à fond, puisqu’il continue de promener sa « quarante » à travers la France. Mais La Farce est bien plus que cela : un authentique roman vécu, plus passionnant et plus drôle que toutes les fictions, un livre nourri de péripéties tragicomiques et de détails « qu’on n’invente pas ». Avec son complice Martin, inséparable et familier bourreau pour lequel il conserve, malgré tout, une profonde, une admirative tendresse, le narrateur forme un tandem inoubliable, dont on suit les rocambolesques aventures avec un amusement croissant. Toujours aux frontières de la légalité ou de la morale, les deux « farceurs » jouent avec la police une partie de cache-cache mouvementée qui nous entraîne de Biarritz à Boulogne et ne nous mesure ni les surprises ni les ingénieux rebondissements. Une grande part de notre plaisir naît du style tout à fait original de Charles Bessière, qui écrit comme il parle, comme il « vante sa marchandise », avec un bonheur d’expression, un humour, des trouvailles et une faconde qui font souvent défaut aux romanciers « professionnels »... Voici un ouvrage d’une singulière fraîcheur dans sa vérité crue, un apport de sang neuf en littérature et un talent qui ne doit rien à personne.

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