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Laurence Peyrin

Laurence Peyrin

Âge : 57 ans

Signe / trait de caractères :   Gémeaux – il y a bien 2 personnes en moi

Le livre qui m’a le plus touchée ?

« Les dossiers extraordinaires » de Pierre Bellemare, ce n’est pas vraiment un roman mais il a provoqué le déclic qui m’a donné l’envie d’écrire.

« Heartburn » de Nora Ephron m’a touché. C’est très sensible et très drôle à la fois sur le thème du divorce. Ce livre m'a ému et fait rire.

Le livre que j’aimerais que l’on m’offre ?

« Autant en emporte le vent », en édition originale et rare. J’ai vu chez Strand Bookstore à New-York, sous vitrine, une version signée par Margareth Mitchell. Mais il faut avoir un ami très riche pour se l'offrir (rire).

Le livre que j’aimerais offrir en cadeau ?

 Un livre est tellement personnel, j’en offre rarement

 Mon livre de chevet ? « De sang froid » de Truman Capote

 

Journaliste passée à l’écriture de romans, Laurence Peyrin entretient le besoin d’écrire l’Histoire et de la partager avec les autres.


 

Journaliste de presse pendant 20 ans, vous décidez de vous consacrer à l’écriture de romans en 2010, quel a été le déclen­cheur ?

Mon déclencheur a été la crise de la middle life, mes enfants étaient grands, mon métier ne me corres­pondait plus et un burn-out m’a fait réfléchir.

Dix ans plus tôt, j’avais commen­cé à écrire La drôle de vie de Zelda Zonk pendant mon congé de maternité. Avec les journées de travail, il m’était impossible de le finir car je ne voulais pas y passer que seulement 20 minutes par jour, je voulais y dédier mes journées entières.

Le burn-out et la remise en ques­tion, tout s'est mêlé, il fallait que je tente l'aventure, je n'avais pas le choix. Je ne voulais pas avoir de regrets 20 ans plus tard et ne pas avoir essayé. J'ai pu démissionner dans de bonnes conditions et j'ai saisi l'opportunité.

J'ai commencé à écrire à temps plein sans chercher de travail, ça a été compliqué, mais ça m'a for­cée à écrire.

Êtes-vous toujours heureuse de cette décision ?

Oui, quel bonheur de me réveiller tous les matins en me disant : quelle chance j’ai de pouvoir raconter des his­toires aux gens.

C’est une liberté incroyable que l’on n’a pas dans le jour­nalisme où tout est très enca­dré par des contraintes édito­riales, par la réalité.

Ici, on a le don de donner des histoires aux personnes. C'est le sens premier du don : je sais écrire, j'ai de l'imagination, chose que tout le monde n'a pas et je le donne aux per­sonnes.

Marcel Pagnol et Pierre Bellemare ont influencé votre avenir, expliquez-nous comment.

Ces deux auteurs représentent la source de mon histoire avec la lecture et l’écriture !

J’étais très réfractaire aux lectures classiques à l’école. L’école nous impose des lectures, mais ne tra­vaille pas à nous faire aimer lire.

Je fais encore beaucoup d'inter­ventions dans les lycées et je le constate toujours, même pour mes enfants, la lecture reste une contrainte.

La première fois qu’on m’a donné de façon obligatoire un livre à lire en CM2, c’était Marcel Pagnol, Le château de ma mère.

Je n'avais pas beaucoup de livres à la maison, pas de point de référence.

J'ai vraiment eu le coup de foudre pour ce livre, avec l'envie de lire constamment le chapitre d'après, de tourner les pages sans fin.

Ma mère s'est abonnée à France Loisirs pour que je puisse recevoir tous les titres de Marcel Pagnol, c'était un sacrifice pour elle vu que nous appartenions à une classe sociale modeste.

Pierre Bellemare, lui, m’a été pro­posé par mon père, qui ne lisait pas énormément. Il a lu Les dossiers extraordinaires et m’a transmis le livre tel un talisman.

Ces dossiers ont provoqué en moi l’envie de raconter des histoires, vraiment raconter, être une ‘pas­seuse d’histoires’. C'est ça le plus important, pas seulement écrire des lignes.

 

« Une lecture ne s’impose pas, je garde ce traumatisme de mes années scolaires »

 

Une autre passion pour vous, le cinéma. Utilisez-vous des ingré­dients du cinéma dans vos livres ?

Ah oui complètement, j'écris mes livres comme des films, je visualise des scènes, j’entends les dialogues, j'écris mes dialogues comme dans un film ou dans la réalité, je ne mets pas de filtres.

J’ai vu Titanic au moins une ving­taine de fois. Je suis passionnée par l'Histoire et mon intérêt pour ce paquebot transatlantique bri­tannique, qui a fait naufrage dans l'océan Atlantique Nord en 1912 à la suite d'une collision avec un ice­berg, lors de son voyage inaugural de Southampton à New York, exis­tait déjà bien avant le film.

Avec mon roman Après l’océan, je voulais reprendre le film mais à la fin, savoir ce que l’on ne raconte pas, après le naufrage. Juste à la fin du film, on devine par une image ra­pide, ce qu’a fait Rose après le nau­frage. Je voulais le raconter.

Vous habitez Grenoble, vous ado­rez New York. Les voyages et les villes vous inspirent beaucoup ?

Oui, effectivement. Pour moi, ce qui commence un roman, c’est le lieu où il se déroule. Sans les voyages, il n’y a pas d’écriture. Les lieux m’inspirent. Après le lieu vient le sujet de so­ciété ou le sujet historique que je souhaite aborder. Par exemple dans L'Aile des vierges, c’était sur le fémi­nisme, sur la passion amoureuse. Dans Après l’océan, la curiosité de ce qui est arrivé aux survivants.

J'aime apprendre, donc il faut que j'aie de la recherche à faire.

Vos personnages sont tirés de la grande Histoire. Comment naissent vos personnages ?

Les personnages sont eux créés bien avant mes mots, ils vivent dans ma tête, leurs traits de caractère s’imposent à moi.

 

« Raconter des histoires, c’est un pouvoir et une liberté incroyables »

 

Que pouvez-vous nous dire sur votre dernier roman Sous le soleil de Soledad ?

Soledad donne le titre au roman alors qu'elle est morte et que c'est Cassie, l'héroïne principale. À tra­vers Cassie je voulais raconter la société actuelle. Quelqu’un qui vit dans notre société et qui ne s'y retrouve pas, comme moi. Tout va trop vite, tout prend des propor­tions incroyables, il y a beaucoup d'injonctions qui sont le contraire de la bienveillance comme par exemple être féministe, amie avec tout le monde, s'accepter comme on est.

Cassie est le symbole d'une femme qui ne s'aime pas, avec ses problèmes de poids, mais à aucun moment on ne sait comment elle est réellement. Le poids des conventions pèse sur elle. Elle doit revendiquer qui elle est mais elle ne veut pas le faire. Elle n’a pas l'occasion de faire le chemin vers elle-même, d’être elle-même, la société lui impose trop les choses. Accompagner Soledad pour son dernier voyage sera la porte ouverte vers son chemin à elle, sans conces­sions, sans peur !

Je voulais aussi parler du deuil. Sole­dad est le symbole qu’on ne fait pas attention aux gens quand ils sont vivants, mais bien quand ils sont morts. Pourquoi se limiter, pour­quoi se priver ? La perte de mon père était le premier gros deuil que je devais affronter. Je me suis posé des questions et j’ai découvert une autre vision du deuil, plus sereine, au Mexique, où il est le passage vers une autre vie. Remplie de lumière et de soleil.

 

« La lecture et la littérature ce n'est pas la même chose. »

 

Photo : © ASTRID DI CROLLALANZA

 Retrouvez Sous le soleil de Soledad sur notre site