« Une première édition de cette traduction aurait paru avant 1498. Ce serait sans doute Florence et la célèbre bibliothèque des Médicis qui aurait fourni à Politien le texte manuscrit sur lequel il fit sa version. Politien fut le protégé des Médicis, de Laurent tout particulièrement qui le traita magnifiquement en lui accordant, non seulement dans son palais à Florence, mais encore dans une délicieuse retraite à Fiesole, une vie de bien-être et des loisirs qui permirent à ce poète bibliophile, enthousiaste des auteurs grecs, de découvrir les trésors de l’antiquité. C’est au cours de ses laborieuses recherches qu’il tomba sans doute quelque jour sur un de ces manuscrits, où le Manuel d’Épictète se trouvait mêlé au Commentaire. Élève de Marsile Ficin, passionné comme lui pour cette Grèce qui revivait dans le milieu enchanteur de la Florence des Médicis, il se laissa prendre à la logique des idées, comme il se laissait prendre à l’harmonie de la forme, et le Manuel d’Épictète le séduisit, si sévère fût-il.
Épictète avait trouvé le secret d’équilibrer, d’unifier les forces de la nature que les hommes de la Renaissance, et Politien comme les autres, sentaient se combattre avec tant de passion en eux,
Il suffira, du reste, de relire la lettre que Politien adresse à Laurent de Médicis, en lui dédiant sa traduction, pour comprendre que ce n’est point l’humaniste seul qui fut entraîné vers Épictète, mais l’artiste moraliste, disciple de Platon, soucieux de l’harmonie des forces de l’âme ; le lettré reconnaissant, soucieux de rendre en bien moral à un maître généreux le fruit d’un travail qu’il devait à ses largesses. »
Fruit d’une sélection réalisée au sein des fonds de la Bibliothèque nationale de France, Collection XIX a pour ambition de faire découvrir des textes classiques et moins classiques dans les meilleures éditions du XIXe siècle.