Pourquoi lui, pourquoi elle et pas moi ? Telle est la question tourmentée qui résonne ici. Celle de cette passion triste, l'envie, le seul des sept péchés capitaux que nul ne serait jamais disposé à admettre. Le plus ambigu et le plus obscène.
Envie, in-videre : regarder mal, regarder de travers. Que de fois n'a-t-on capté, dans le regard de l'autre, cet éclat torve et détourné, ce « mauvais oeil » de l'envie, qui provoque en nous un malaise inexplicable ? Mais n'est-ce pas l'envieux autant que l'envie qui en est la victime ? Car s'il est vrai que tout péché apporte du plaisir, le poison de l'envie génère le tourment et la souffrance de l'âme. L'envieux souffre du bénéfice, du bonheur, de la jouissance des autres, vécus comme une réduction de son être, signe de son échec ou de son infériorité.
Si la relation et la comparaison sont constitutives de la condition humaine, sommes-nous alors inévitablement condamnés à l'envie ? Certes, toute comparaison n'est pas nécessairement envieuse. Elle peut être simplement compétitive, émulative, ou même sympathique. Néanmoins le germe de l'envie est toujours aux aguets lorsque l'homme se voit réduit à la figure de l'homo oeconomicus, le narcissisme postmoderne règne en maître.
À la lecture de la mythologie et de la théologie, de la littérature et de la philosophie, des sciences sociales et de la psychanalyse, l'auteur poursuit cette passion triste de l'Antiquité à nos sociétés modernes, des contes de fées aux faits les plus ordinaires de notre vie quotidienne. Elle en souligne aussi toute la violence lorsqu'elle se transforme en ressentiment. Comment alors échapper au vertige de l'envie ? Quelles autres passions opposer à cette passion triste ?