
Tenter d'expliquer une oeuvre, c'est la désamorcer. Et il n'y a aucun moyen non plus d'éviter cette réduction. On peut seulement tenter de retarder ce moment le plus longtemps possible. Et c'est en retardant ce moment que nous nous ouvrons à l'oeuvre.
En 1976 et en 2020, soit à plus de quarante années de distance et presque aux deux extrémités de ce recueil d écrits sur l'art, mis en perspective grâce à un entretien liminaire mené par Nathalie Jungerman, Marcel Cohen énonce presque mot pour mot ce même principe. Faut-il parler de coïncidence ? De constance, plutôt : celle d'un écrivain fidèle à des rencontres dont il a fait des partis pris sans sacrifier son exigence de retenue face aux oeuvres qu'il accompagne.
Compagnonnages, en effet, qu'ils soient immédiats ou lointains : Antonio Saura plus (que tout autre, mais aussi Arnulf Rainer, Colette Brunschwig, Bram van Velde, Kazuo Shiraga... Démontrant une affection instinctive et sans faille pour les artistes auxquels l épreuve de l'histoire ou des écueils personnels ont imposé une pratique mesurée, contrariée, voire empêchée- en un mot : éthique - de leur art, l'auteur se hisse à cette noble pauvreté, à cette élégance mathématique où il décèle un idéal.
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