
Au coeur de l'Asie multiple, face aux lamas, aux chamanes et à tous ceux qu'ils appellent idolâtres,
des missionnaires musulmans se lancent sur la Route de la Soie avec l'espoir d'y étendre l'islam
mystique. Mais alors que leurs contemporains jésuites connaissent un succès restreint, ces soufis de
Samarcande parviennent à enraciner au coeur des sociétés leurs croyances, leur spiritualité et leur
pouvoir. Lorsqu'en 1680 l'un d'entre eux, dénommé Âfâq Khwâja, monte sur le trône de Yarkand
et instaure un régime fondé sur les principes pratiques et spirituels du soufisme, c'est une nouvelle
donne qui s'engage dans l'histoire de l'islam asiatique. Aux confins de la Chine, du Tibet et de
l'Asie centrale, des maîtres soufis (ishân) ont ainsi constitué une dynastie sainte et se sont
emparés du pouvoir temporel. Bravant l'Empire Qing comme le Tibet lamaïste, les Khwâjas
naqshbandîs du Turkestan oriental mettent en oeuvre une utopie politique et religieuse où les sujets
sont appelés à devenir compagnons, où les saints deviennent des rois. Leur idéal se veut moral et
orthodoxe, mais il révèle autant un questionnement sur le monde et ses souffrances. À partir de
sources manuscrites inédites et pour certaines inconnues jusqu'alors, le présent ouvrage retrace
l'histoire de ces souverains mystiques depuis leur venue dans la région au XVIe siècle jusqu'à leur
éviction définitive par les armées mandchoues au cours du XIXe siècle. À travers la notion
d'ishanat, sont explorées les questions du soufisme politique, de l'utopie, du pouvoir et de la
sainteté.
Nous publions uniquement les avis qui respectent les conditions requises. Consultez nos conditions pour les avis.