Une journée d'Ivan Denissovitch, c'est celle du
bagnard Ivan Denissovitch Choukhov, condamné à
dix ans de camp de travail pour avoir été fait prisonnier
au cours de la Seconde Guerre mondiale.
Le récit nous montre sa journée depuis le coup sur
le rail suspendu dans la cour qui marque le lever,
jusqu'au court répit du soir et au coucher, en passant
par les longues procédures de comptage, la
peur des fouilles, les bousculades au réfectoire, les
travaux de maçonnerie par un froid terrible dans
l'hiver kazakhe, les menues chances et malchances
de la journée. Archétype du paysan russe moyen,
Choukhov, homme humble et débrouillard en qui
le bien fait encore son oeuvre, a su se libérer intérieurement
et même vaincre la dépersonnalisation
que ses maîtres auraient voulu lui imposer en lui
donnant son matricule.
Le talent propre à Soljénitsyne, son don de
vision interne des hommes apparaissent ici d'emblée
dans une complète réussite : ce chef-d'oeuvre à
la structure classique restera dans toutes les anthologies
du vingtième siècle comme le symbole littéraire
de l'après-Staline.