
Une double question traverse les études rassemblées dans
ce livre : en quoi le fait d'être une femme peut-il affecter la
création en poésie ? Qu'est-ce qui fait la différence des écrits
poétiques féminins ? En guise de réponse, ces études
témoignent de la situation problématique du poète femme
dans la tradition littéraire et dans la société.
Présentées dans une perspective principalement
diachronique, du XIXe siècle à nos jours, elles mettent en
lumière les grandes lignes d'un triple mouvement qui marque
le rapport des poètes femmes à la tradition masculine et, en fin
de compte, à leur propre altérité à laquelle la culture les a de
tout temps renvoyées : une tendance à l'effacement ou au rejet
des définitions traditionnelles de la différence sexuelle vécue
comme un fardeau, et à la subversion des codes poétiques et
sociaux ; un phénomène d'appropriation et d'exploration
d'une identité féminine réinvestie et renouvelée, et
l'émergence d'une autre tradition ; enfin, le dépassement de
la dichotomie des genres féminin/masculin dans la traversée
des genres sexuels et littéraires, qui aboutirait à l'avènement
d'une tradition poétique finalement commune.
Les études contenues dans ce livre révèleront parfois une
approche particulière de certains thèmes universels, tels que le
corps, le désir, la nature, le sacré, le temps, la mort..., la
présence de thèmes plus spécifiques aux écrits féminins, tels
que la satire de la domination masculine, la critique du
pouvoir ou des hiérarchies qui structurent la société et la vie
littéraire, l'intégration d'une expérience vécue de femme, la
recherche de généalogies féminines... Elles rendent compte de
certains phénomènes d'écriture liés à ces thèmes, un rapport
souvent problématique, ou dissident, aux conventions et aux
principes esthétiques hérités de la tradition, une poétique de la
révolte, du conflit avec l'homme, ou de la relation à l'autre et
du lien entre femmes... une réflexion sur le langage qui peut
aller jusqu'à la recherche d'une alternative au «langage de
l'homme» défini comme «langage de l'oppresseur»...
Si elles abordent la question de l'écriture féminine, de la
création au féminin, ce n'est pas indépendamment de la
question de la situation des femmes dans la tradition littéraire
et la société ; ce n'est jamais pour réduire les écrits féminins à
une spécificité qui opérerait sur eux, et sur le phénomène
poétique, une réduction, un enfermement. Au final, ressort de
ces études ce qui fait des écrits poétiques féminins avant tout
des écritures.
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