Qu'est-ce que le mur d'argent ? Un mythe ou une réalité ? Cette expression,
prêtée à Édouard Herriot, a longtemps désigné l'opposition des milieux
financiers à la réussite d'un gouvernement de gauche, particulièrement
s'agissant des expériences du Cartel des gauches (1924-26) ou du Front populaire
(1936-37). Ce livre se propose de revisiter cette problématique dans le contexte
historique du retour, inédit sous la Ve République, de la gauche française au
pouvoir en mai 1981. Analysant les figures modernes du mur de l'argent, une
attention toute particulière est portée au rôle de la Banque de France, chargée
de la mise en oeuvre de la politique monétaire. Est-elle, comme elle le fut jadis,
la figure de proue de l'opposition des milieux financiers ? Plus largement, c'est
donc des rapports entre la banque centrale et la puissance tutélaire de l'État
dont il sera question. Replacé dans la main de l'État par le Front populaire,
nationalisé à la Libération, l'Institut d'émission apparaît, en ce tournant des
années 1980, comme plus que jamais intégré dans la sphère publique. Entre
tutelle statutaire et désir d'autonomie, alors même que l'économie française
est, dès avant 1981, secouée par une conjoncture défavorable qui met au jour
l'étendue de ses faiblesses, comment la Banque de France parvient-elle à
faire entendre sa voix et influencer les décisions gouvernementales ? En ces
quelques années se jouent la réforme d'un système économique et l'avenir de
ces institutions.