
La construction en 1966 d'un nouveau lycée à Getxo, au Pays
basque, fait ressurgir l'histoire de Rogelio Ceron, cet homme
solitaire arrimé à un terrain isolé et à son figuier depuis la
fin de la guerre civile. Rogelio Ceron est un ancien phalangiste. De
ceux qui, à la nuit tombée, allaient de maison en maison pour y
débusquer les «rouges» et les fusiller sans autre forme de procès.
Au cours d'une de ces expéditions punitives, Ceron est troublé par
le regard haineux du jeune Gabino, à qui il vient d'enlever son
père et son frère. Le phalangiste se persuade aussitôt que cet enfant
finira par le tuer. Convaincu que le gamin et lui sont liés par le
destin, il rompt avec les phalangistes pour se consacrer à la mission
tacitement donnée par Gabino, la surveillance du figuier planté
par l'enfant sur la tombe secrète des siens. Pendant trois décennies,
à l'image des familles des victimes de la guerre civile, Rogelio et
Gabino n'échangent pas un mot, le silence est un des personnages
de la tragédie.
Le phalangiste et l'enfant incarnent les deux Espagne, mais au fil
des années, ils ne rentrent plus dans le cadre initial de leurs camps. Le
figuier symbolise l'impossible oubli, le souvenir vivant et silencieux.
Pour pouvoir aller de l'avant, il faut raconter à nouveau ce qui s'est
passé, récupérer le souvenir de la peur, de la violence et du silence.
Le roman de Pinilla est un roman de la mémoire, du souvenir, qui
veut démonter le monologue de la mémoire collective du franquisme
par un contre-discours qui redonne leur dignité aux vaincus.
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