«Enchâssées» dans les replis d'une rivière d'apparente sérénité, les existences
flottantes des «Transparents», «vagabonds luni-solaires», et des humbles riverains-pêcheurs
au trident dont le poète dira l'initiante bonté, écoutent «chanter les
heures sur le sage cadran des eaux». La Sorgue de René Char entrouvre «le mystère
qui chante dans ses os», inflexions nourricières qui viennent de l'«arrière-pays»
natal et qui drainent, au-delà de la seule nature créatrice, un premier alphabet
de ce pays devenu poème. La réflexion portera sur l'écriture du lieu. Vaucluse,
dans sa dimension delphique, est un des grands archétypes sibyllins du bassin
méditerranéen avec son gradin de montagne, le gouffre, la couleur du ciel et son
laurier toujours vert. De la source pétrarquienne à la sentence mallarméenne que
«Rien n'aura eu lieu que le lieu»,
nous tenterons d'analyser le lien entre nature et poésie qui donne son sens le plus
intime à l'oeuvre de René Char.