Les portails de la cathédrale Saint-Pierre-et-Saint-Paul de
Nantes n'ont jusqu'à présent bénéficié que d'un intérêt très limité
tant auprès de la recherche que du public. Pourtant, derrière le
calcin altéré de la pierre, se découvre l'un des plus importants
chantiers de sculpture du XVe siècle, un foyer artistique parmi les
plus féconds de la fin du Moyen Âge.
Mal comprise parce qu'elle fut longtemps mal datée, la sculpture
de ces portails doit aujourd'hui être située dans les années en-tourant
le milieu du XVe siècle, alors que le duché de Bretagne est
à l'apogée de son rayonnement politique et diplomatique. C'est
bien dans un dialogue permanent avec les acteurs
et les débats institutionnels ou religieux de la principauté
que s'élabore ce programme sculpté. Un regard
attentif et renouvelé sur ces groupes permet
d'en comprendre les enjeux et de saisir toute la
complexité des rouages décisionnels d'un chantier
largement dominé par le poids des ducs bretons mais où surent
s'imposer les volontés précises d'un clergé soucieux de pastorale.
Une telle profusion narrative, un tel foisonnement imagier au coeur
de la ville ne pouvaient en effet laisser indifférents un prince alors
très attentif à l'affirmation de son pouvoir et des clercs inquiets de
l'encadrement des fidèles.
Il n'est pas jusqu'à la qualité des artistes recrutés qui n'exprime
le statut prestigieux de ces travaux. Les sculpteurs de Saint-Pierre
méritent d'apparaître parmi les plus grands artistes de la fin
du Moyen Âge.