Aldo Ciccolini est sans conteste l'un des plus grands pianistes contemporains. Il fut partenaire des plus grands chefs et interpères (Mitropoulos, Furtwängler, Cluytens, Schwarzkopf, Thibaut...) ; son immense carrière internationale n'a cessée d'être saluée par de nombreux prix et distinctions, depuis ce jour de 1949 où il remporta le 1er prix du concours Marguerite-Long à Paris. Interprète au répertoire électrique, ayant à son actif plus 80 références discographiques, son nom prestigieux est désormais rattaché à celui de Debussy, Satie, Séverac, Janác(...)k, Liszt, ...
Mais en disant cela, l'on ne dit rien : rien de la magie qui opère à chaque concert lorsque, dès les premières mesures, l'artiste, dans une économie d'effets, capte l'émotion d'une salle entière par la seule densité de sa sonorité et la justesse du phrasé. Ni de l'intensité de son interprétation, fondée sur un respect absolu de l'écriture et une compréhension intime des oeuvres qu'il travaille encore et encore jusqu'à l'imprégnation totale.
« Je suis un lirico spinto », aime à répéter Aldo Ciccolini en référence à cette voix lyrique puissante et surtout incisive. Alors que certains parlent d'alchimie, il vous répond sacerdoce et mission. Car Aldo Ciccolini se définit comme un passeur, un messager, habité depuis l'enfance par une unique exigence intérieure : saisir l'essence de la musique pour mieux en transmettre le message.
Fruit des ses entretiens avec le pianiste Pascal Le Corre, son ancien élève et ami, ce livre est l'occasion de revisiter « de l'intérieur » le parcours de cet artiste hors du commun : sa formation à Naples où la promesse d'une carrière d'enfant prodige ne suffit pas à le détourner de sa quête artistique ; son installation en France, sa patrie de coeur, ferment de culture et de liberté, où il enrichit sa vision de la musique et de l'Art au contact de Marguerite Long, Alfred Cortot mais aussi d'acteurs comme Marie Marquet ou d'écrivains tels Jean Cocteau ; son rôle de pédagogue au Conservatoire de Paris qui lui permet de transmettre l'originalité de sa demande artistique.
Au travers de ses réflexions sur l'enseignement du piano, la place de l'Art en Occident ou encore le rôle de l'artiste contemporain, l'on découvre que cet artiste discret et modeste cache un être passionnée, ennemi des fausses valeurs, libre dans ses choix et ses opinions jusqu'à parfois l'impertinence. Fort de la complicité qui lie l'élève à son maître, c'est l'attachant portrait d'un homme en quête perpétuelle d'absolu que nous livre ici Pascal Le Corre.