Et je voyais se dérouler les royaumes de la
Terre ; ou plutôt ces villages, collines, forêts,
moissons et vignes, rochers et lacs, les
nuages même, étaient devenus mon
royaume dont j'avais été dépossédé à ma
naissance déjà, mais surtout de plus en
plus au long de ma croissance, chaque fête
d'anniversaire réussissant mal à masquer
une humiliation, un renoncement, une
spoliation supplémentaires. Non que je
fusse roi, l'héritier seulement ; trop jeune
encore malgré mon âge apparent, enfant
émerveillé devant une inépuisable
exposition de jouets protégés dans la
vitrine de la distance. Ainsi, dans la
descente et l'approche sinueuse, tout
m'apparaîtrait rafraîchi dans son relief,
comme si l'écart de mes deux yeux m'avait
découvert enfin son utilité.