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La poésie, c’est « quelque chose entre le blanc et la blessure ». D’emblée, Jean-Pierre Sautreau ne finasse pas avec l’essentiel : quand le jeu n’a de sens que si l’on ose brûler la chandelle par les deux bouts, cela signifie qu’écrire implique, comme allant de soi, la dangereuse urgence de détourner les règles et règlements de l’ordinaire existence qui « embastillent l’âme ». Le poète écrit pour « dessaisir les repères », pour construire « à chaque bouger de mot » l’impossible scénario. Et voilà que ce n’est plus du jeu ! Mieux vaut aller garer ses abattis sur la touche. Ah ! Qu’il est beau le spectacle racoleur de notre confortable « quotidien taupinière » ! Et pourtant, le poète n’en veut pas. Il est sur le terrain, solidaire des libres intempéries de la vie qui n’est pas oublieuse de vivre. Et d’écrire. En cela, J-P. Sautreau se situe dans le droit fil d’une poésie lyrique tenaillée par les disettes du vécu : Rutebeuf, Ronsard, Aragon, Éluard… Le poème exige « la patience des cœurs battants », l’enthousiasme d’avancer « sur la pointe des mots », le risque à chaque instant d’écarter « les tarots fous du bonheur » sur la table de l’amour. Ainsi, le poète nous rappelle-t-il une vérité élémentaire : « tous les mots que j’ébruite » sont autant de « sédiments de mon pas d’homme ». La poésie est de ce monde, et plus que jamais elle nous est nécessaire. J-P. Sautreau l’assume à ses risques et périls, cela « est clair, comme une première neige ». Louis Dubost