En écrivant Ecaterina Teodoroiu, l'héroïne du Jiu - La Jeanne d'Arc de Roumanie, Mariana Cojan Negulescu intervient à sa manière dans ce débat et milite ce faisant pour une poursuite de la construction mémorielle de la Grande Guerre, matrice douloureuse du monde dans lequel nous vivons. La biographie qu'elle consacre à Ecaterina Teodoroiu est beaucoup plus qu'une biographie. En effet, dépassant le cadre stricte de ce genre historique, ce livre est d'abord une réflexion et une évocation personnelles de l'auteur sur le courage et l'engagement d'une jeune paysanne qui décida d'assumer son destin dans un monde et à une époque au cours desquels la femme n'avait que rarement, voire jamais voix au chapitre.

Il faut dire que ses blessures au feu, son refus de se laisser capturer, puis son évasion l'arme à la main, imposent encore aujourd'hui le respect, tout comme ils forcent l'admiration. Comme tous les grands héros, comme toutes les grandes héroïnes, Ecaterina Teodoroiu mourut jeune, fauchée par un tir de mitrailleuse alors qu'elle montait une attaque. Mais en mourant elle posa l'une de ces pierres qui jalonnent la construction de la mémoire de la Nation Roumaine. Cette mémoire, rythmée, au fil des décennies, par les vicissitudes de l'histoire, parfois instrumentalisée, prit de nombreuses formes jusqu'à s'ancrer profondément dans la mémoire collective du peuple roumain et à faire entrer, aux côtés de la Reine Marie, Ecaterina Teodoroiu dans la Grande Histoire de la Roumanie et plus généralement dans celle des femmes européennes.

Mariana Cojan Negulescu

Y a-t-il un mystère, une ineffable donnée, qui fasse qu'une jeune fille, une simple campagnarde - une bergère - destinée à être mère et femme au foyer, se transforme, comme dans les contes de fées, en héroïne sans peur, et devienne à son insu une légende ?

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