Depuis plus de quarante ans, Emmanuelle Béart construit une filmographie qui, film après film, raconte des histoires de femmes françaises allant de la fin du XIXe siècle à nos jours. À travers ses rôles, elle incarne des héroïnes en quête d’absolu, tiraillées entre pureté et avilissement, fragilité et force, vitalité et pulsion de mort. Toutes partagent une difficulté à trouver leur équilibre – dans l’amour, la maternité, la sexualité ou leur carrière – et s’affirment en se révoltant contre l’ordre établi, la famille, un amant ou même l’idée que les autres se font d’elles.

Dans ces personnages se dessine aussi la condition même de l’actrice : la nécessité d’être regardée avec justesse pour donner naissance à son art à l’écran. Et c’est précisément dans l’œil de ses “piliers” – Jacques Rivette, André Téchiné, Claude Sautet –, ainsi que d’autres grands cinéastes, qu’Emmanuelle Béart a pu révéler, avec une rare évidence, la force et la complexité de sa persona.

Arnaud Duprat est maître de conférences HDR à l’Université Rennes 2 et membre d’“Arts : Pratiques et Poétiques” (EA 3208). Spécialiste de Luis Buñuel et d’études actorales, il est l’auteur de Le dernier Buñuel (PUR, 2011), Isabelle Adjani, un mythe de l’incarnation (Le bord de l’eau, 2013), Les films de Carlos Saura et Geraldine Chaplin : entre correspondance et identification(Le bord de l’eau, 2018) et de Buñuel : la última etapa francesa (Prensas de la universidad de Zaragoza, 2024). Il a codirigé Corps et territoire, arts et littérature à travers l’Europe et l’Amérique (PUR, 2014), Regards sur No (Pablo Larraín, 2012) (PUR, 2017), La Maman et la Putain, politique de l’intime (Le bord de l’eau, 2020), Paradoxes de l’acteur numérique : jeux, corps, personas (PUR, 2022) et Vivien Leigh : « I’m not a Film Star, I’m an Actress » (EUD, 2023).