En ce temps-là je lisais Harry Potter mais j’avais des pensées d’adulte. On m’avait mis un pyjama bleu pour m’en dissuader et j’admets volontiers que j’avais l’air d’un con. On y réfléchissait à deux fois avant d’attirer l’attention sur son cadavre.
J’étais allé voir la chef pour lui expliquer que le jour où je voudrais en finir, je viendrais m’égorger devant elle pour qu’elle puisse constater, dans des conditions quasi expérimentales, que le bleu et la mort se marient harmonieusement. Ça l’avait glacée ; trente minutes plus tard on me réhabilita dans mes vêtements.
Mais c’était trop tard. Je l’avais déjà enfilé, leur foutu déguisement, et je n’avais pas du tout l’optimisme de me changer deux fois dans la journée. Le soir venu, j’ai découvert qu’il était plus confortable de vivre le jour en pyjama que de dormir la nuit en jeans. Je me suis mis à bien l’aimer finalement et la vie s’est étirée ainsi, de bleu.
Je l’ai même conservé après l’hôpital. Je pressentais que c’était un costard pour la vie alors quitte à l’assumer jusqu’au bout je l’ai planqué au fond de mon sac le jour de la sortie. En temps normal je n’aurais pas eu le droit, mais cela faisait longtemps que j’avais été éjecté du temps normal. D’ailleurs c’était mon grand regret dans la vie.