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Dans la vraie vie, Thierry Radière est professeur d’anglais, comme Mallarmé avant lui. Ce métier offrirait-il une porte dérobée vers la poésie de ce monde ? Il faut le croire, tant Entre midi et minuit est habité par un ailleurs, si proche et si loin, qu’il s’agit d’attraper avant qu’il ne se sauve. Le recueil compte trois parties : « Poèmes totémiques », « Je n’aurais pas pu voir » et « J’avais déjà dit un jour ». Les aubes n’y sont pas navrantes. Souvent levé de bon matin, Thierry Radière s’assied à sa table de travail, le laboratoire de ses rêves, cette vigie de fortune. Secrétaire de lui-même, il note choses vues, images entraperçues, épiphanies fugaces, merveilleux nuages. Fuir, làbas fuir ? Pour voyager, inutile de faire ses valises : quand il se met à écrire, de minuscules îles se mettent à flotter un peu partout autour de lui. L’un des poèmes est dédié à Fernando Pessoa, et certaines pages pourraient être tombées du Livre de l’intranquillité. Ici, une femme ouvre une armoire et retrouve sa robe de mariée. Les souvenirs lui montent à la tête. A-t-elle menée la vie qu’elle avait imaginée l’espace d’une soirée, grisée par le champagne ? Chez Thierry Radière, on sourit souvent jaune. Des pères se pendent, d’autres partent, certains essaient d’assurer leur rôle. Entre la nostalgie du soleil et la neige du présent, la mélancolie sert de fil rouge. Dans ces textes intimistes, on parle à voix basse, et coulent les jours. Les lecteurs d’Apollinaire et Jean-Claude Pirotte auront plaisir à découvrir un poète qui aide à s’émerveiller et à rêver, le temps de continuer à mourir en douceur.