
Qu'est-ce qui fait la cohérence de l'oeuvre si personnelle d'Éric
Rohmer ? Ce cinéma de la parole est aussi un cinéma du corps,
dont cet essai propose une petite histoire dans ses démêlés
plus ou moins glorieux avec l'âme et le monde. Rohmer entend
restaurer l'intégrité du langage cinématographique : le corps
de l'acteur ne serait en effet qu'un «sujet mince» s'il n'était
incorporé par le jeu de la mise en scène à l'espace filmique. La
beauté du corps humain, pétition de principe, est éprouvée au
gré de récits prenant les héros au filet de leurs contradictions.
Mais le corps, dans sa singularité irréductible, résiste aux
grimaces des clichés, aux discours décalés, à la psychologie
réductrice, à l'emprise des récits.
La vie qui anime le corps des acteurs-personnages et de
l'oeuvre ne saurait être seulement définie par le pouvoir de la
pensée : l'inconscient fait aussi bouger ce qui menace de se
figer. La création cinématographique doit s'effacer face au réel
découvert et se résoudre en une transparence. Pourtant les
jeux de l'humour et de l'ambiguïté encadrent paradoxalement
le caractère impénétrable de la forme finie et infinie qu'est
l'humain.
Ce cinéma de l'émotion retenue cherche à toucher le
spectateur, condition ultime pour trouver son intégrité. Ce
livre est un dialogue avec les films vus avec attention jusque
dans leurs moindres détails révélateurs, éclairé par les écrits
d'Éric Rohmer et enrichi des remarques du réalisateur lors de
sa conversation inédite avec l'auteure (en octobre 2007).
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