
Dès son âge enfantin, Françoise Dolto prend le pli d'écrire des lettres à
ses parents, à ses proches, à ses amis. Cela fait partie de son éducation.
Elle s'y adonne, sous le contrôle de sa gouvernante, avec un charme,
une vivacité, un style, qui feront d'elle une grande épistolière. Cet art
de vivre deviendra très vite un art de penser. À côté des intimes, des
intellectuels, des artistes, apparaissent les grandes figures de la psychanalyse,
Rudolph Loewenstein, Marie Bonaparte, René Spitz, et plus
tard Daniel Lagache, Serge Leclaire, Wladimir Granoff, Maud Mannoni,
et surtout Jacques Lacan, le compagnon de route. Puis viendront les
«suivants», jeunes analystes à qui elle se fait un devoir de transmettre,
et enfin tous ceux qui lui demandent conseil et auxquels elle
répond toujours de longues lettres attentives.
Ainsi dans ces lettres passent, en marge de son oeuvre théorique et
clinique, les interrogations, les incertitudes, les débats, les intuitions
qui parfois s'élaborent dans d'éblouissants face-à-face avec ses interlocuteurs.
Mais, au-delà de cet extraordinaire témoignage sur l'histoire
de la psychanalyse et de ses institutions, cette correspondance, à la
façon d'un journal intime, révèle un aspect plus secret de sa personnalité,
montrant dans des lettres plus personnelles combien sa vie familiale
(son mari, Boris Dolto, et ses enfants) a enrichi sa réflexion.
Souvent, Françoise Dolto se dit comme «arrachée à elle-même par
trop de gens, trop de choses». Trop de lettres à écrire ? «Je sais bien
que je dois faire quelque chose pour avoir la dignité de vivre, écrit-elle
à son indéfectible ami le comédien Alain Cuny, et que je suis faite pour
répandre une certaine paix, pour laisser dans mon sillage calme les
êtres blessés se reposer de leurs tempêtes en se laissant flotter.»
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