Nonobstant les progrès considérables qu'elle a apportés à une meilleure
connaissance des premiers temps de Rome, l'oeuvre de Jacques Poucet se
distingue surtout par la méthodologie développée pour analyser et exploiter
les sources de cette période primordiale. Adepte convaincu de la démarche
pluridisciplinaire en histoire et en lettres, Jacques Poucet manie avec une
rare aisance le commentaire des textes littéraires ou épigraphiques, l'analyse
des témoignages archéologiques, l'histoire de la religion et l'érudition
mythologique, l'étude des sociétés humaines. Autant de disciplines nécessaires
au travail de l'historien de l'antiquité.
Par ailleurs, disciple éclairé de Georges Dumézil, il identifie les ingrédients
de la tradition légendaire des origines de Rome en adaptant aux récits fondateurs
- et, en particulier, à l'histoire d'Énée - les techniques d'analyse
inspirées de l'école comparatiste.
Mais la grande originalité de l'oeuvre de Jacques Poucet est d'avoir cerné
très exactement le statut épistémologique de ces récits, que l'on peut résumer
en une question : «Cet éventail de textes abrite-t-il des noyaux d'histoire
authentique et, dans l'affirmative, comment parvenir à les repérer et à
les utiliser fiablement dans une reconstruction historique ?»
La notion d'«origines» s'impose quand il s'agit d'honorer Jacques Poucet.
Celle d'«images» également, car tout discours sur les origines met en
oeuvre des imaginaires puissants qui structurent le comportement des hommes
par rapport à leur histoire.
Les vingt-sept contributions rassemblées dans ces Mélanges articulent les
deux termes du binôme «origines/images» dans des disciplines, des périodes,
des spiritualités, des contextes très divers, en l'honneur d'un maître
qui a su restituer aux temps des origines leur part de symbole et rendre au
lecteur des textes anciens la liberté de préférer le mythe à l'histoire.