L'approche de l'Histoire souffre parfois du même mal que
l'apprentissage de la lecture ou des langues étrangères : la méthode
globale. On n'observe plus les faits dans leur perspective chronologique,
ce qui devrait être le b-a ba de l'Histoire, on procède par images
globales. Il en est ainsi dans l'étude de l'histoire contemporaine avec
l'«anticolonialisme» et de son antithèse le «colonialisme». Ces concepts
globaux ne sont pas des instruments d'étude scientifique. Leur forte
connotation émotionnelle paralyse le jugement. Ce sont des outils de
lutte idéologique. L'«anticolonialisme» bénéficie d'une image positive,
généreuse, ouverte et libératrice. Le «colonialisme», à l'inverse, est
accablé de péchés irrémissibles qui rendent le fait colonial
odieux à beaucoup de nos contemporains.
Dans le cas particulier de l'histoire de l'Indochine française,
l'idéologie anticolonialiste véhicule une image faussée de l'entreprise
coloniale en Extrême-Orient. Contre cette idéologie, l'auteur ne
cherche pas à défendre le bilan de la colonisation, cela a déjà été fait,
et fort bien. Ce que l'auteur analyse ici, c'est d'abord la base mensongère
de l'idéologie anticolonialiste : l'invention du concept de
«colonialisme» qui ne correspond à aucune réalité. Ce sont
ensuite les omissions, les inversions chronologiques et l'instrumentalisation
sélective des événements utilisées par les anticolonialistes.
L'anticolonialisme est ainsi passé à l'épreuve des faits. Il n'y résiste pas.