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La thèse de François Bluche consacrée aux Magistrats du Parlement de Paris au XVIIIe siècle est l’étude la plus neuve et la plus complète qui ait été consacrée à la société judiciaire à cette époque. L’Académie française, pour récompenser les livres d’histoire de France dispose d’un grand prix fondé par le baron Gobert. Mais l’acte de fondation porte que l’ouvrage honoré devra être non seulement le fruit de recherches approfondies dans un domaine non encore exploré, mais un ouvrage « écrit ». C’est donc avec justice que l’Académie décerna son prix le plus important aux Magistrats du Parlement de Paris car François Bluche, travailleur infatigable, heureux chercheur, érudit scrupuleux est aussi un écrivain à la langue colorée, précise, rapide. Il s’est spécialisé dans l’étude de la noblesse, prouvant qu’au XVIIIe siècle, il n’existe plus qu’une noblesse, robe et épée étant désormais unies par mille liens familiaux. C’est ainsi qu’il étudie les Magistrats du Grand Conseil, de La Cour des. Monnaies, Les Honneurs de la Cour, L’anoblissement par les charges (en collaboration avec Pierre Darye), Les Pages de la grande écurie... portant la lumière dans des questions jusqu’alors très obscures et pleines de fausses notions. Cette fois, François Bluche, pour la collection des Grandes Études Historiques abandonne les institutions et la société monarchique, le droit nobiliaire, les services de l’État et de la Cour de France pour un grand, un très grand sujet européen. L’expression « despotisme éclairé » est entière dans les manuels à peu près en même temps que le baroque. Mais c’est une expression assez obscure, en ce sens qu’elle recouvre des philosophies politiques et des systèmes de gouvernement qui du Danemark au Portugal, de la Prusse à Naples, de la Russie à l’Espagne, diffèrent l’un de l’autre. Ce sujet riche, passionnant n’a fait l’objet d’aucune synthèse. Aussi le livre de François Bluche, complet, nuancé, appuyé sur les textes du XVIIIe siècle, riche en formules frappantes, a-t-il un immense intérêt de mise au point et de nouveauté. Le despotisme éclairé véhicule de dures réalités, comme la monarchie prussienne de Frédéric II, des essais de réforme, des mythes, certaines façons d’administrer, une philosophie des sociétés, une puissance certaine de propagande, tout ce qui fait le prodigieux intérêt de « l’âge des lumières » à la veille de notre Révolution. Cet âge a eu son idéal d’État, son « modèle » politique, plus dur, plus absolu que la vieille monarchie semi-religieuse de Louis XIV. Mais de même que la France a presque refusé le baroque et le rococo, elle n’a pas admis cette forme de despotisme où l’État s’est fait Dieu, où il est lui-même sa fin et sa justification. Notre seul « despote éclairé » est sans doute Napoléon Ier, mais il régnait sur une nation révolutionnée.