Le Temps visuel se penche sur la question de la temporalité des
images et déploie une critique des modèles qui dominent
aujourd'hui la discipline censée s'occuper de celle-ci : l'histoire
de l'art. Keith Moxey démontre à quel point nous sommes
encore toujours prisonniers d'une lecture téléologique de l'histoire,
qui ne peut concevoir le temps des images que comme une
série d'influences que chaque oeuvre exercerait sur la suivante.
Avec l'émergence des études visuelles, un décloisonnement s'est
heureusement produit, et l'histoire de l'art s'est enfin ouverte
aux arts non occidentaux, mais sans que cela ne remette en question
la priorité du temps de la modernité occidentale comme
méridien universel. Mais le temps des images s'écoule-t-il vraiment
à la même vitesse en tous lieux ? Dans quelle mesure peut-on
faire place à des récits subalternes ou divergents ?
Le Temps visuel navigue entre certaines analyses exemplaires
du présent (Gerard Sekoto, Thomas Demand, Hiroshi Sugimoto,
Cindy Sherman) et quelques grands maîtres du XVIe siècle
(Bruegel, Dürer, Grünewald et Holbein), pour faire émerger
l'«hétérochronie» fondamentale des images. Entre un universalisme
décontextualisé et le désir d'un retour aux origines, il s'agit
de faire place à l'idée dérangeante que les images ont une temporalité
qui leur est propre et qui rythme les échanges que celles-ci
entretiennent avec leurs spectateurs.