Le village africain à l'école de l'eau
Clefs pour une ingénierie sociale et culturelle du développement
Depuis mes lointaines études au Cameroun jusqu'à mes études universitaires en France, j'ai passé vingt ans de questionnement et d'errance dans la planète des savoirs élaborés. Vingt ans pour trouver une réponse à la question que je m'étais moi aussi posée depuis très longtemps, une question sans cesse amplifiée par les difficultés de l'Afrique : pourquoi ça ne marche pas ? Pourquoi, au bout d'un siècle de scolarisation, les populations africaines n'arrivent-elles pas à s'approprier le savoir technique et scientifique qu'elles côtoient chaque jour ; sans vraiment l'habiter ? Pourquoi ce savoir venu d'ailleurs reste-t-il toujours comme juxtaposé à l'individu, tout en lui cachant si bien les mécanismes de son fonctionnement ?
Si les recherches universitaires m'ont donné les moyens théoriques pour comprendre les cultures de l'oralité en général, ce sont les villageois camerounais qui, en s'engageant dans une expérience de vérité avec des ingénieurs et des techniciens bénévoles français - à travers des projets d'eau potable -, ont fourni la réponse la plus appropriée à mes questions. Aussi, mis à part son volet technique, un projet d'eau potable représente un levier fondamental du progrès social et culturel pour l'Afrique, à condition toutefois de définir, point par point, ces enjeux, avec les populations bénéficiaires. Faute de quoi, les populations ratent une occasion de choix de réaliser une mutation culturelle comprise par tous.
Cet exposé en appelle donc à une reconsidération des besoins spécifiques des populations du Sud et à un renouvellement des méthodes d'action, en vue d'un développement durable en Afrique aussi.