La présente étude s'attache à
décrypter l'organisation et le
fonctionnement de juridictions
situées au premier niveau de l'appareil
judiciaire. Longtemps dépeintes comme
inefficaces, incompétentes, partiales
et même âpres au gain, les justices
seigneuriales font l'objet, depuis
plusieurs années déjà, d'une révision historiographique qui montre au contraire
qu'elles peuvent être pleinement parties prenantes des régulations sociales,
attachées davantage à réconcilier qu'à sanctionner les plaideurs. Fondée sur le
dépouillement exhaustif d'archives de la pratique judiciaire, l'étude tente une
approche à la fois quantitative et qualitative des registres audienciers d'affaires
judiciaires et d'amendes, tout en faisant une large place au droit coutumier
en vigueur dans ces deux provinces du royaume de France. Cette recherche
examine ainsi la manière dont l'audience s'organise, le personnel qu'elle
mobilise, mais également l'activité quotidienne des tribunaux seigneuriaux
à travers la procédure suivie, le type d'affaires jugées et les condamnations
prononcées ; le tout en essayant de dégager les «modèles» susceptibles d'avoir
influencé la conduite de l'exercice judiciaire dans cette région et à ce niveau
institutionnel. Au-delà de ces aspects strictement juridique et judiciaire, ce
travail tente enfin d'appréhender le profil des plaideurs, la manière dont ils
usent de la justice, et plus largement la place et le rôle assignés à cette dernière
vis-à-vis des justiciables et de l'autorité seigneuriale.