L'odeur du minotaure. De la blessure que lui firent les fils de fer barbelés,
alors qu'elle s'élançait, confiante, dans un champ où broutaient des vaches, la petite
fille n'a gardé qu'une trace sur le bras. Elle qui ne voulait pas grandir a réussi un
parcours sans faute. Son enfance terne, sa première histoire d'amour avec un jeune
homme aussi rangé qu'elle, elle les a remisées bien loin. Marjorie, après de brillantes
études, est devenue la «plume» d'un ministre. Caparaçonnée dans ses certitudes,
belle et conquérante, elle se joue des hommes et de son passé.
Mais le numéro qui s'affiche sur l'écran de son téléphone portable tandis qu'elle
s'apprête à rejoindre son ministère, elle le reconnaîtrait entre mille, bien qu'elle ne l'ait
plus composé depuis longtemps : sa mère l'appelle au chevet de son père mourant.
Quand, au volant de sa puissante voiture, elle quitte l'autoroute qui la conduisait chez
ses parents, pensant prendre un raccourci, un choc violent la fait s'arrêter net. Elle vient
de heurter un animal. Bouleversée, tremblante dans la nuit de la forêt, elle recueille le
dernier souffle du grand cerf qu'elle a tué. Et c'est à ce moment que sa vie bascule.
L'Odeur du Minotaure, comme les contes initiatiques auxquels il s'apparente par
l'extrême concision de sa langue et la simplicité de sa structure, est un beau roman de
la métamorphose.