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« L’affaire du collier de la reine » a tant passionné les contemporains, puis les historiens et les romanciers, que la vie et la personnalité de son héros malheureux, le cardinal-prince Louis René Édouard de Rohan, ont été réduites à son implication dans cette formidable escroquerie dont Marie-Antoinette fut doublement victime. Or, comme le montre Éric de Haynin dans cette alerte biographie, il méritait que l’on s’intéressât à l’ensemble de sa vie (1734-1803). Coadjuteur - dès 1760 - et successeur désigné de son oncle Constantin de Rohan à l’évêché de Strasbourg, membre de l’Académie française en 1761 à vingt-sept ans, c’est lui qui reçoit, et complimente, la dauphine Marie-Antoinette lors de son entrée en France. Ambassadeur extraordinaire à Vienne en 1772, il éblouit par sa magnificence, mais l’impératrice Marie-Thérèse, indisposée par sa vie privée scandaleuse, demande son rappel. Mal vu de Louis XVI et, surtout, de Marie-Antoinette, il n’en devient pas moins cardinal en 1778, et évêque de Strasbourg en 1779, à la mort tant attendue de son oncle. Prodigue somptueux, vaniteux et extraordinairement crédule, soucieux en outre de reconquérir la faveur de la reine, il sera la proie à la fois du fameux mage Cagliostro, qui lui promet de faire de lui le prince le plus riche de la chrétienté, et d’une aventurière la « comtesse de la Motte » qui, au moyen de fausses lettres signées « Antoinette de France », lui fait acquérir - soi-disant au nom de la reine - un fabuleux collier. C’est l’énorme scandale que l’on connaît. Le prince-évêque de Strasbourg est arrêté au milieu de la Cour, embastillé, acquitté par le Parlement, exilé dans son abbaye de La Chaise-Dieu. Soutenu par l’opinion, il regagne son diocèse en 1788. Élu député du clergé aux États Généraux, adversaire déclaré de la constitution civile du clergé, il sera un contre-révolutionnaire opiniâtre. Son diocèse étant à cheval sur la France et le Saint-Empire, il invoque sa qualité de prince d’Empire pour refuser les lois de la République, et lève des troupes pour l’armée de Condé. Victime de l’effondrement de l’Empire romain et germanique sous les coups de Bonaparte, il se retire et meurt à Ettenheim en 1803, après avoir compensé par sa fidélité à la religion, et à la royauté, ses inconséquences passées.