Ses amis l'appellent «mon Gilles», «not'Gilles»,
«mon Gillou», et le Gilles, il en a des amis !
Il y a Cendrars à qui il emprunte le titre de ce
livre, Rimbaud, Eluard, Apollinaire, Charles Le
Quintrec, Tristan Corbière, Louis Brauquier,
André Frédérique, et j'en passe.
La manière d'écrire de Gilles Durieux, syncopée
ou chaloupée, produit une mélodie étrange,
simple et subtile à la fois, dont je ne trouve pas
l'équivalent chez nos contemporains. Parfois, on
dirait que tel ou tel poème est traduit de l'américain,
car une certaine poésie américaine d'aujourd'hui
a bien plus de liberté d'écriture qu'une
certaine poésie française.
Ce qui n'a rien d'américain, en revanche, ce sont
des mots, des expressions, des images qu'il va
chercher dans le breton, bien sûr, mais aussi dans
une langue mystérieuse, sonore et bigarrée, dont
il semble être le seul à connaître les racines et les
étymologies.
Dans la «brumaille», la «fouette» et la
«fouaille», Gilles, jongleur de mots, s'en donne
à coeur joie et batifole comme un gamin facétieux.
Il apporte une grande bouffée d'air iodé dans
notre poésie.
Voilà pourquoi j'aime ces moments de bonheur,
de nostalgie, et ces coups de gueule, souvent
masqués de pudeur, que sont les poèmes de
Durieux.
Ils sont aussi de grands sémaphores d'amitié.
Jean Orizet
[extrait de la préface]