Salué comme un Attrape-coeurs moderne, le premier livre
de Bret Easton Ellis, Moins que zéro, lui a valu, à vingt ans, une
consécration immédiate. Il est devenu le roman emblématique des
années 1980, déclinant déjà tous les thèmes qui continueraient
d'inspirer cette Comédie inhumaine, selon la formule de Cécile
Guilbert : le règne des apparences, l'hypocrisie, le nihilisme d'une
époque consumériste, l'incommunicabilité entre les êtres. Portrait
acide et cru d'une jeunesse désenchantée, Moins que zéro raconte
les errances d'un étudiant de la côte Est qui tente de dissiper son
mal-être dans une recherche incessante de tous les plaisirs, mais
auquel ni le sexe, ni l'alcool, ni l'argent n'apportent le bonheur
et la puissance escomptés.
Les Lois de l'attraction gravitent autour de trois garçons
appartenant à cette même jeunesse dorée, dont l'existence
tragique se consume de rage et de désespoir. American Psycho fit
scandale aux États-Unis par son tableau implacable d'une société
déshumanisée, incarnée par un jeune golden boy de Wall Street
obsédé par l'argent et la réussite, par ailleurs serial killer performant.
Zombies, évocation satirique d'un monde gangrené par le vice et
la superficialité, Glamorama, qui reprend la peinture désabusée
de la faune branchée new-yorkaise, Lunar Park, texte plus
autobiographique mais où l'on retrouve les paradis artificiels et
l'atmosphère violente et sulfureuse des précédents livres, et enfin
Suite(s) impériale(s), prolongement de Moins que zéro qui marque
aussi la fin d'un cycle, illustrent le génie romanesque d'un écrivain
hors norme, au style précis, glacé et incisif.
Son sens de l'observation, de la dérision, de la formule qui
bouscule et son humour au vitriol font de Bret Easton Ellis l'un
des romanciers les plus importants et les plus originaux de la
littérature américaine.