«La psychanalyse, disait Freud, est plutôt du côté de la sculpture
(per via di levare) que de la peinture (per via di porre). Annie Guérineau-Jomelli
a choisi de franchir ce «pas de côté» à sa pratique
d'analyste en nouant une correspondance entre cette praxis et ces
métiers de la création qui la rendent - enfin ? - possible. Elle invente
ainsi une intrigue - au sens de ces petits événements de la vie qui forment
le noeud d'une pièce dramatique, pièce qui nous conduit aux
confins de la création d'une oeuvre. Les deux peintres avec lesquels
elle choisit d'écrire la trame, Daniel Doublier et André Jomelli (deux
noms à intrigue, vous dis-je !) se lancent et se relancent dans une verve
créatrice digne de La lettre volée. Il y a du Dupin, de la Reine et le
cachet de la poste qui scandent la succession du quotidien, comme
celle des saisons. Et puis les rappels culturels nombreux (Bram Van
Velde, Vinci, Rembrandt, Bach...), loin de l'étouffer par des coups de
pinceaux savants, stimulent la dramaturgie, constante, vigoureuse, de
ces artystes dans un jeu de lettres où le lecteur est entraîné sans qu'il
ne les lâche plus (à moins que ce ne soient eux qui ne nous lâchent
plus). Une harmonie se dégage de la lecture. Celle qui nous happe à
l'écoute d'un conte, ou qui nous bouleverse devant le drame du
clown.»
Cosimo Trono