Quelqu'un tombe, et dans sa chute est traversé par mille et
une images, pareilles à ce défilement connu de ceux qui ont
frisé la mort, la grande émotion. Sauf qu'ici, c'est la vie qui
menace et effraie.
De cet effondrement littéral et symbolique jaillissent un
rythme et un air.
On parlera de petite musique, celle qui, une fois venue par
on ne sait où, ne nous quitte plus. Et ne cesse de revenir,
lancinante et entêtante.
C'est la vie qui fait son manège. Il n'est plus alors de trame
tranquille ni de douce mélodie. La phrase cahote et la voix
déraille.
Dans la chute, il y a un moment où la vitesse devient
constante. Arrivé à ce point de stabilité, la chute pourra
durer des jours, des mois et des années, sans varier d'un
pouce. Il me semble que je tombe depuis des heures mais il
m'est difficile d'être plus précis, d'une part, parce que je ne
porte pas de montre, pour des raisons qu'il serait oiseaux de
développer ici, et d'autre part, quand bien même j'en posséderais
une, elle ne me servirait à rien puisque le trou est noir
comme du cirage ou comme les ténèbres...