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J’ai tout mis dans des boîtes à chaussures que j’ai été porter dans la cour. J’ai imbibé le carton de combustible à fondue et j’ai allumé. Le feu a été long. En voyant les couleurs qui montaient du bûcher, mes yeux se sont embués. Ce bleu-vert qui fendait l’air, était-ce le polaroid de ma confirmation? Quelle fête ancienne expirait de ce grésillement? J’avais la gorge serrée: je tuais quelque chose. Je pleurais mes traces.
Un collectionneur passionné de bandes dessinées se voit menacé d’éviction par son propriétaire, car son appartement, encombré d’innombrables albums, est réputé insalubre. Au moment où il prend sa retraite de l’enseignement, un homme est amené à réexaminer un épisode mystérieux de son enfance et se rend compte, à un demi-siècle de distance, qu’il a sans doute été témoin d’un meurtre. Un vieil acteur argentin, jadis célèbre, en tournage au Québec dans une coproduction internationale, confie à son chauffeur combien il trouve scandaleux, à son âge, de devoir gagner sa vie en faisant semblant d’être quelqu’un d’autre. Au cours d’une retraite dans un monastère, un homme renoue avec un oncle qu’il avait depuis longtemps perdu de vue et qui s’est récemment mis en ménage avec une toute jeune femme, qu’il appelle « sa fille ». Un homme, à qui on a diagnostiqué un cancer, ne lui donnant plus que deux mois à vivre, brûle tous ses souvenirs et achète un aller simple pour le Cambodge.
Dans chacune des nouvelles de ce recueil, il y a un personnage qui prend conscience que sa vie est finie, comme on le dit d’un ensemble fini. Que faire du temps qui reste, alors? Que faire de soi? Des objets qu’on a accumulés et qui seraient la seule trace de notre passage sur terre? À qui se donner? La prose si personnelle de Michael Delisle fait encore une fois merveille pour sonder la profondeur de l’instant en apparence le plus banal, pour éclairer ce qui se cache sous la surface lisse de la vie, pour éclairer le mystère sans jamais lui faire perdre son pouvoir de fascination.