«Le livre de Chehem Watta ne vise pas la démonstration, ni l'exégèse,
il est poème, cantique d'amour à Rimbaud, à la corne de l'Afrique, et à
l'union des deux, reconnaissance et prière. Un livre exigeant. Il réclame
qu'on fasse silence, qu'on taise toutes les rumeurs prosaïques de notre
quotidien, qu'on se rende disponible. Le prologue est ascèse : répétitions,
rythmes, lancinances, comme pour épuiser les nerfs autant qu'une marche
en caravane par un soleil de plomb. Ces mots jetés, vraie litanie de pierre,
de ciels, d'hier et d'aujourd'hui, sont une incantation pour accéder à la
libération de soi, un exorcisme, un passage initiatique, une invocation
et un appel aux mystères. Alors Rimbaud paraît, mirage parfois visible,
présence permanente qui ne quittera plus le lecteur jusqu'à la dernière
page, même quand Chehem parle de lui-même, ou du monde ou de nous.
Rien ne fut jamais écrit en écho plus fidèle au rêve de Rimbaud et qu'il
nous livre dans son testament poétique : les dernières phrases de «Génie».
Que dans la ferveur, nous sachions le voir «suivre ses vues, ses souffles,
son corps, son jour» ! Ces pages sont animées de la respiration d'Arthur
Rimbaud, gamin de Charleville et caravanier d'Afrique.»
Claude Jeancolas