Il me faut convoquer la nuit
Lui faire bonne figure
La nuit est partout, pleine, profonde
Elle pleure doucement sur ton épaule
Elle sombre sur ton sein amoindri
Elle froisse ton coeur, glace tes mains
[...]
La toute-puissante nous jettera à terre
sans rémission, nous expulsera
de nos songes et de larmes suffoquant
nous demanderons grâce
Elle nous sera donnée
Se défaire, chronique d'une séparation
inéluctable dédiée à la mère de l'auteur «dans
son exil Alzheimer», est un vrai livre de poésie.
Tout y est juste : l'observation des réalités
concrètes (des lieux, du corps), la perception des
signes les plus ténus d'un esprit étonné livré à la
démence, l'affleurement des souvenirs communs,
la vision, à travers le prisme du coeur, d'un passé
familial quasi légendaire, tout y est juste, c'est-à-dire
simple, pudique, sans emphase.
Au-delà de la relation mère-fille, c'est quelque
chose de la condition humaine, de l'universel
humain, de l'expérience que fait chacun de nous
du lien d'amour et de douleur entre deux êtres,
que peint ici Elisabeth Launay-Dolet.
La force y est douceur, intensité dans la
mesure, infinie tendresse, absorption de soi dans
l'autre. Se défaire est une petite merveille de
sensibilité empathique.
J. H.