Nul poète de cette terre de Guadeloupe n'a incarné mieux que Sonny
Rupaire (1940-1991) l'idée de liberté. Ses mots qui sont définitivement
ancrés dans la terre et le temps guadeloupéens, avec ses pieds ici, et ses
yeux qui ont goûté à l'ailleurs quand le vent de l'histoire enjouait les cieux
de l'Algérie et de Cuba dans ces années 1960, résonnent encore comme les
marqueurs d'une identité affirmée, d'un vouloir téméraire : Mwen sé
Gwadloupéyen ! Mwen sé timoun enkyèt a on lilèt enkyèt... Cette igname
brisée qu'est ma terre natale... Chyen varé-mwen ! Chyen foré-mwen !...
Je suis la sapotille roulant dans le dédale des sentiers où l'on craint trop
souvent de marcher... Gran parad ti kou baton... Onlo sé mèt a dé-o-twa...
Matouba, gencive verte, gencive ouverte... Dans un cri s'est levée une île
avec son ceinturon de mer sanglé...
Dans Sonny Rupaire, fils inquiet d'une igname brisée, on suivra pas à pas
celui qui a été de son vivant une véritable légende, et le lecteur accueillera
avec appétit ses diverses facettes : du mauvais garçon bousculant les
bonnes gens des Jeux floraux au militant clandestin en passant par le
soldat du FLN et le poète imposant le créole à la table des muses.
Ce livre est une invitation à un triple voyage : voyage biographique à
travers des témoignages inédits ; plongée analytique dans l'oeuvre ;
envolée dans la réception par un dialogue avec la littérature, la peinture et
la photographie.