«Les impôts sont le prix à payer pour une société civilisée,
trop de citoyens veulent la civilisation au
rabais.» Cette phrase d'un ministre des Finances des
Etats-Unis a de quoi surprendre. Pour comprendre cette
prise de position, il faut la situer dans son contexte : 1937.
Le ministre des Finances en question s'appelle Henry Morgenthau.
Il obéit à une demande du président Franklin
Delano Roosevelt, lancé alors dans une croisade morale.
Pour le lecteur du début du XXIe siècle, la lecture du
rapport dont elle est issue, publié ici pour la première fois,
est fascinante. On comprend qu'une enquête sur les
données dont elle dispose permet à l'administration
des impôts de découvrir assez facilement qui fraude,
comment, grâce à qui, le tout avec un important degré de
précision. Les nombreux exemples évoqués dans le rapport
soulignent également combien les montants en question
sont considérables. Cela reste vrai, aujourd'hui aussi
bien qu'hier. A un moment où l'Europe est confrontée à
de gros problèmes budgétaires de moyen terme, en même
temps qu'elle joue une partie de son avenir (retraites, éducation,
recherche...), les gouvernements subissent un très
lourd manque à gagner en termes de recettes budgétaires.
De quoi conférer un air très contemporain à la formule de
Morgenthau, celle d'une Europe qui se donne une constitution
mais ne s'offre pas les moyens d'une civilisation
qui ne soit pas au rabais.