Populaire ou savante, l'identité entretient des relations étroites
de légitimation avec la mémoire et l'histoire nationale ou régionale.
C'est ce qu'examine cet ouvrage, dans une périphérie de l'espace occidental
: l'histoire des nations de l'Amérique latine indépendante bruisse
des souvenirs du passé, des conflits internes ou externes, des vagues
d'immigrants et de leurs bagages culturels.
Partout, du Mexique au Brésil ou à l'Argentine, de nombreux
groupes mémoriels cherchent à objectiver un savoir historique, un passé
commun dont dépend la formulation de l'identité locale ou nationale.
En Europe, l'identité s'est en partie construite par rapport à un
«autre» extérieur. En Amérique latine, la construction s'élabora aussi
par rapport à un «autre» intérieur indien ou noir : bien qu'exaltant
parfois mais tardivement les phénomènes de métissage, elle tendit à
valoriser au contraire certains liens de filiation avec l'Ancien Monde et
les transferts culturels ou politiques transatlantiques.
On connaît la plaisanterie selon laquelle «le Mexicain descend
des Aztèques, le Péruvien des Incas et l'Argentin du bateau»... Sauf
qu'au XIXe siècle et pendant une partie du XXe, de México à Lima ou
Santiago, une large part des élites latino-américaines s'est plus sentie
européenne qu'indienne ou métisse...
Une contribution importante sur un sujet essentiel de l'histoire latino-américaine
: comprendre les racines très diverses et les modalités d'évolution des
sentiments nationaux et de leurs représentations.