Au début de février 2006, éclate de façon spectaculaire mais
aussi de la manière la plus vile et la plus désastreuse, l'affaire des
caricatures avilissantes du Prophète Mohammed. Elles ont été
considérées par le monde musulman comme une énième et
provocante agression raciste et une grave atteinte à sa dignité de la
part d'une Europe avec laquelle il souhaite pourtant engager un
dialogue profond et symbiotique entre les civilisations, afin de
juguler les extrémismes de tout bord. Or, les explications
fallacieuses d'une prétendue «liberté d'expression» ne pourront
convaincre, si l'on se souvient du nombre non négligeable d'écrits
interdits dès lors qu'ils touchent ou blessent des sentiments humains
en Europe. Mais la splendide ignorance, dont fait preuve le Vieux
Continent pour décréter un «deux poids et deux mesures»
permanent, s'impose comme un produit délibéré d'une
méconnaissance de l'Autre, voire d'une inculture inexcusable à
propos de partenaires sud-méditerranéens qui, eux, en revanche,
n'ont jamais cessé d'apprendre les langues et les cultures nord-méditerranéennes,
aux dépens même de leur propre authenticité et
malgré les difficultés inhérentes au sous-développement
économique et social de leur Région.
Dans ces conditions, peut-on expliquer cette aphonie
langagière qui plane en permanence sur le dialogue Nord-Sud
méditerranéen ? Et comment y remédier ? Les textes réunis ici en
sept chapitres - dont l'objectif initial n'était pas de traiter la question
évoquée qu'il faut espérer passagère - essaient cependant
d'apporter, à travers la communication langagière, des éléments de
réponse plus généraux sur ce dialogue de sourds et de dégager en
conséquence quelques pistes de réflexion pour l'avenir.